Trois syndicats de médecins appellent à ne plus prescrire de médicaments anti-Alzheimer

Commentaire. Trois syndicats de médecins appellent à ne plus prescrire de médicaments anti Alzheimer.

La ministre, à l’étonnement général, aillant maintenu le remboursement de ces médicaments inutiles, chers, voir dangereux, les syndicats de médecins appellent à la seule attitude logique. Pauvre ministère de la santé.

 

L’ARTICLE :

Paris, le lundi 7 novembre 2016 – Imitant son prédécesseur, le ministre de la Santé a refusé de suivre l’avis de la Haute autorité de Santé (HAS) et d’initier le déremboursement total des médicaments indiqués contre la maladie d’Alzheimer, en dépit d’un service médical rendu (SMR) jugé une nouvelle fois insuffisant. Cette décision a soulevé un tollé dans le monde médical qui a déploré le manque de courage du ministre et regretté qu’un signal aussi contre-productif concernant la régulation du marché du médicament soit envoyé au grand public.

Que dira-t-on aux familles demain ?

MG France, qui depuis 2011 milite pour le déremboursement, voire la disparition, de ces traitements, ne décolère plus. Le syndicat qui imaginait déjà que les économies réalisées (la prise en charge des médicaments contre la maladie d’Alzheimer a entraîné 75 millions d’euros de dépenses en 2016) soient fléchées pour financer les soins primaires et les solutions de répit pour les aidants est à l’origine d’une fronde. Avec la Fédération des médecins de France (FMF) et le Bloc, soit les trois syndicats ayant approuvé  la convention, il signe un communiqué appelant les médecins à suspendre leur prescription des traitements indiqués dans la maladie d’Alzheimer. Outre que ce front commun permet de rappeler incidemment que la signature de la convention ne doit pas être appréciée par le gouvernement comme un gage de musèlement, un tel message syndical est rare. Néanmoins, la mission première des organisations de défense des médecins n’est pas totalement au second plan dans cette action. Les syndicats font en effet valoir : « En cas de plainte d’une famille, les responsables politiques et sanitaires seront mis en cause. Les prescripteurs, informés des risques, et qui continueraient à prescrire, pourraient l’être aussi » remarquent-ils se faisant écho à la dénonciation il y a quelques semaines sur son blog du docteur Christian Lehmann : « Pas question de dire la vérité aux malades, à leurs familles, ce qui nécessiterait du courage, ouvrirait la porte à des questionnements aussi légitimes que dangereux pour les pouvoirs en place : Depuis combien de temps saviez-vous ? ». Défendant patients et médecins, les trois syndicats appellent donc le ministre à faire preuve de courage.

Un dilemme international

Dans les faits, la diminution des dépenses d’Assurance maladie associées aux médicaments anti-Alzheimer traduit déjà un recul de la prescription. Les dépenses sont ainsi passées de 116 millions à 75 millions d’euros. Cependant, certains médecins généralistes (qui étaient 92 % en 2009 à avoir pris en charge au moins un patient atteint de la maladie d’Alzheimer au cours des douze derniers mois) et de nombreuses familles restent attachés à des traitements dont ils considèrent souvent qu’ils constituent la seule action à pouvoir être facilement mise en œuvre, quand les autres prestations sont moins bien connues (51 % seulement des généralistes s’estimaient bien informées sur les prises en charge non médicamenteuses en 2009), plus complexes et moins bien remboursées (les médicaments anti-Alzheimer sont remboursés à 100 % dans le cadre de l’ALD, pas l’ensemble des autres prestations). Pour beaucoup, il s’agit d’une des manifestations de la trop grande primauté accordée en France aux médicaments dans la démarche de soins. Mais la France n’est pas seule à se débattre face à ce dilemme complexe : la plupart des autres pays ne se sont pas engagées dans la voie du déremboursement.

Aurélie Haroche 

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Article paru dans la Lettre Médecine du Sens n° 140