Tampons hygiéniques : risques réels ou informations toxiques ?
Commentaire. Du Glyphosate dans les tampons. Une émission sur FR5 à voir en replay.
C’est assez impressionnant de voir à quel point les toxiques envahissent chaque partie de notre vie, jusqu’à l’intimité des femmes.
https://www.youtube.com/watch?v=uQe1R7EqSHI
Le JIM évoque aussi ce thème.
L’ARTICLE :
Paris, le jeudi 27 avril 2017 – Un documentaire diffusé mardi soir sur France 5 consacré aux tampons hygiéniques a été largement commenté par la presse et internet. Conduite par Audrey Gloaguen, l’enquête, principalement à charge, évoque les risques qui seraient associés aux tampons hygiéniques.
Des chocs toxiques objets de toutes les attentions
L’accent a notamment été mis sur le syndrome de choc toxique (SCT) illustré par le témoignage de victimes. L’augmentation relative des signalements (même si le SCT reste rare) suscite en effet l’attention récente tant des consommatrices que des scientifiques. En fait de hausse, le Centre national de référence des staphylocoques de Lyon recensait en 2008 huit cas de SCT, puis 16 en 2009, un chiffre qui est resté stable jusqu’en 2013 (à l’exception d’un pic à 19 en 2011).
Une collecte de tampons usagés a été réalisée cet automne par les Hospices civils de Lyon afin de mieux comprendre les mécanismes en jeu dans ces SCT. Il est par ailleurs apparu que le choc toxique est la conséquence de la combinaison de différentes facteurs parmi lesquels notamment l’absence chez les victimes d’anticorps anti-TSST-1 (condition régulièrement passée sous silence dans les reportages et enquêtes consacrés au SCT). La force d’absorption du tampon entre également en jeu comme l’a mis en évidence l’émergence de cas lors de la mise sur le marché au début des années quatre-vingts de nouveaux tampons très absorbants. La problématique du SCT tient également au retard du diagnostic qui peut parfois errer. Par ailleurs, une partie non négligeable de patientes (20 % selon certains praticiens) ayant été victimes de SCT à cause d’un tampon hygiénique ne reçoivent pas cette information, ce qui les expose à un risque de récidive (d’autant plus accru qu’elles présentent une absence d’anticorps anti-TSST1 ce qui est souvent le cas).
Dioxine : une exposition infinitésimale par rapport à celle liée à l’alimentation
Cependant, certains observateurs affirment que les causes de ce SCT pourraient ne pas seulement tenir à ces considérations biologiques et bactériologiques mais à la composition des tampons, suspectée de favoriser la prolifération bactérienne. D’une manière générale, les composés des tampons alimentent toutes les peurs. La présence de dioxine à l’état de traces suscite notamment l’inquiétude.
Dans le reportage d’Audrey Gloaguen, le toxicologue Dominique Lison établit un lien entre ces dioxines et le risque d’endométriose. Cependant, pour l’heure, on ne trouve trace d’aucune publication recensée sur Pub Med établissant récemment une association entre le fait de porter des tampons et l’endométriose. Par ailleurs, une étude publiée en 2002 dans la revue Environnemental Health Perspective, avait souligné qu’aucun des tampons étudiés ne présentaient de 2,3,7,8-tetrachlorodibenzo-p-dioxin, les dioxines les plus dangereuses. Concernant les autres types de dioxine, elles étaient présentes à l’état de trace. « Les résultats de notre analyse mettent en évidence que l’exposition aux dioxines via les tampons est approximativement 13 000 à 240 000 fois moins importante que l’exposition via l’alimentation » écrivaient les responsables de l’étude. Les auteurs avaient même fini par conclure que la présence de dioxine dans les tampons ne contribuait pas significativement à l’exposition des américains à ces toxiques.
Manque de transparence
Les inquiétudes portent également sur la présence de phtalate, une substance cancérigène bannie en Europe de la fabrication des jouets et des cosmétiques (mais pas des tampons) et du glyphosate (principal ingrédient du célèbre désherbant Round up, finalement toujours autorisé par l’Europe mais objet de nombreuses suspicions). Là encore, la présence est très faible, mais la multiplication des expositions favorise les craintes. On rappelle notamment qu’une femme utiliserait entre 11 000 et 15 000 tampons au cours de sa vie (tout au moins si elle se sert exclusivement de cette méthode de protection, si elle les change très souvent et si elle n’est jamais enceinte…). Ces doutes sont favorisés par le manque de transparence. D’abord, les informations sur le risque de choc toxique ne sont pas toujours exhaustives et explicites dans toutes les notices d’utilisation. Ensuite, l’opacité demeure sur la composition exacte des cotons et celluloses qui forment les tampons.
Concernant les études, elles demeurent restreintes, concernant notamment sur le caractère éventuellement spécifique de l’exposition des muqueuses vaginales à certaines substances.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont lancé des analyses sur la composition des tampons hygiéniques (dont les résultats seront disponibles fin 2017).
Au-delà de ces travaux épidémiologiques et toxicologiques, il ne serait pas inintéressant de s’interroger sur les fondements sociologiques de la défiance vis-à-vis de certains produits représentant un indéniable progrès, notamment pour le confort des femmes (qu’il s’agisse des tampons ou des couches jetables pour les nourrissons)…
Léa Crébat
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Article paru dans la Lettre Médecine du Sens n° 163