Prozac : 40 000 morts par suicide et qui en parle ?
Commentaire. Lisez cet excellent article d’Augustin de Livois, qui rappelle bien les faits d’un des plus grands scandales, mais qui lui n’a jamais fait l’objet d’un procès, à l’inverse du Médiator.
L’ARTICLE :
22 dec 2019.
Chère amie, cher ami,
Vous connaissez certainement le Prozac®.
C’est un antidépresseur ISRS.
Cet acronyme veut dire “inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine.”
C’est un psychotrope qui opère dans le cerveau en jouant sur les niveaux de sérotonine, un neurorécepteur.
Les médecins prescrivent ce médicament contre :
- la dépression légère ou grave ;
- l’anxiété ;
- les troubles obsessionnels compulsifs ;
- le syndrome de stress post-traumatique ;
- les troubles de dépersonnalisation ;
- l’anorexie mentale.
C’est un médicament très utilisé.
1 Américain sur 10 a déjà consommé (1) des antidépresseurs ISRS. Certains d’entre eux l’ont fait pendant plus de 10 ans.
Le Prozac® est venu remplacer la première génération d’antidépresseurs comme le Valium et d’autres médicaments de la classe des benzodiazépines.
Par rapport à ces traitements, le Prozac® et ses copies étaient censés :
- ne pas produire d’effets indésirables ;
- ne pas susciter d’accoutumance.
L’ennui, c’est que l’histoire du Prozac® dit à peu près le contraire.
Des études controversées
Le laboratoire Lilly a reçu une autorisation de mise sur le marché américain pour le Prozac® en 1987.
En 1990, 44 procès avait été intentés contre Lilly en raison des effets secondaires liés au médicament.
On lui reprochait notamment de causer des suicides chez les patients. Ennuyeux pour un antidépresseur !
Ces procès n’ont pas dû étonner le personnel du laboratoire. Car dès 1978, alors qu’étaient menées des études sur la molécule, une note interne de Lilly indiquait :
“Il y a eu un assez grand nombre de signalements d’effets indésirables (…). Un patient dépressif a développé une psychose (…). On a signalé de l’akathisie et de l’agitation chez certains patients.” [1]
L’akathisie, c’est une agitation extrême associée à des pensées suicidaires et meurtrières. La personne éprouve un fort sentiment de dépersonnalisation et est sujette à des impulsions violentes.
Cet état extrême peut conduire une personne à des actes très violents exécutés avec le plus parfait sang-froid.
D’autres notes révèlent que lors des études menées par le laboratoire, il a parfois fallu donner d’autres tranquillisants aux volontaires qui testaient le Prozac®.
En 2004, le laboratoire teste un nouveau médicament : le Cymbalta qui appartient à la même classe que le Prozac®. Lors de l’étude, une des volontaires, choisie spécifiquement parce qu’elle n’était pas dépressive, est allée se pendre dans la salle de bains avec le pommeau de douche.
Quelle a été la réaction du labo ? Cette jeune femme avait bien caché sa dépression !
Des milliers de victimes
L’histoire est sordide. Hélas, le nombre de suicides ou de meurtres violents potentiellement liés au Prozac® ou aux médicaments de la même classe est considérable.
Un site Internet www.ssrisstories.org recense près de 5000 histoires violentes de suicides ou de meurtres en Amérique du Nord. Il s’agit, pour l’essentiel, de faits ayant été relatés dans les médias.
L’expert David Healy, qui a mené une vaste enquête sur le sujet dans les 80-90 estimait en 2004 que sur les 40 millions de personnes ayant pris du Prozac®, 40 000 s’étaient suicidées à cause du médicament !
Le précédent allemand
Le plus inquiétant dans cette histoire est que, dans le fond, tout le monde savait que ces dangers existaient.
En 1984, la Bundesgesundheitsamt (BGA), l’agence allemande du médicament, avait refusé l’AMM au Prozac®. L’administration motivait cette décision par le fait que durant les essais du médicament, il y avait eu 16 tentatives de suicides, dont certaines avaient réussi.
Le laboratoire insiste cependant et demande à ses propres équipes en Allemagne de maquiller les résultats des études sur les suicides.
Le Directeur de la filiale allemande du labo, Claude Bouchy, écrit à sa hiérarchie les remarques suivantes :
“Je ne pense pas que je pourrais expliquer au BGA, à un juge, à un reporter ou même à ma famille pourquoi nous ferions cela [maquiller les données], spécialement concernant la question sensible du suicide et des pensées suicidaires.
Personnellement, je me demande si nous aidons vraiment la crédibilité d’un excellent système de signalement des EMI [effets médicaux indésirables] en appelant surdose ce qu’un médecin signale comme une tentative de suicide et en appelant dépression ce qu’un médecin signale comme étant des pensées suicidaires.”
Ce type de méthodes n’a pas été que le fait de Lilly.
Pour les autres antidépresseurs ISRS comme le Paxil®/Dexorat® de GSK ou le Zoloft® de Pfizer des comportements semblables ont été signalés.
Certains labos recrutaient spécifiquement pour le groupe placebo des suicidaires !
Ainsi, on se suicidait dans le groupe prenant le médicament et on se suicidait dans le groupe témoin ! C’était un jeu à somme nulle. Seule la sélection changeait. On mettait des dépressifs graves dans le groupe témoin et des gens les moins dépressifs possibles dans le groupe du médicament.
Il fallait y penser !
Le médicament a finalement été autorisé en Allemagne en 1992 sous l’appellation Fluctin®. Mais l’administration allemande a demandé que le risque de suicide soit listé sur la notice.
Les autres pays ont suivi.
Désormais, le risque de suicide ou de violence lié au Prozac®, et plus généralement aux antidépresseurs ISRS, est connu de tout monde. Il apparaît sur les notices au moins lorsque le médicament est à destination des enfants ou des jeunes adultes.
Même les psychiatres sont au courant ! [2]
Et aujourd’hui ?
Le brevet pour le Prozac® est arrivé à expiration en 1999. Cela fait 20 ans !
D’autres molécules sont venues s’ajouter à ce marché colossal.
En France, un quart de la population prendrait des psychotropes[3]. 10% consommeraient spécifiquement des antidépresseurs.
Peut-être y a-t-il des cas où cela est nécessaire.
Mais dans de nombreuses situations, comme la dépression légère, il paraît bien plus prudent de s’intéresser à la phytothérapie, aux solutions alimentaires et au changement de mode de vie.
Naturellement vôtre,
Augustin de Livois
Article paru dans la Lettre Médecine du Sens n° 278