Perturbateurs endocriniens : la science tirée par les cheveux

Le Figaro revient sur une information qu’il a relayée hier : « Une «étude» le prouve, pouvait-on lire partout jeudi : les perturbateurs endocriniens contaminent même des militants écologistes soucieux de leur mode de vie, selon des analyses menées par l’association écologiste Générations futures ».

Le journal observe qu’« un point important a été largement omis dans le battage médiatique : le document en question n’est en rien de la science. C’est de la communication. Et ses auteurs ne prétendent d’ailleurs rien de plus… ».

Le Figaro rappelle ainsi que l’ONG « a demandé à 7 personnalités de l’écologie […] de lui confier une mèche de leurs cheveux, pour y rechercher quelque 200 perturbateurs endocriniens. Un échantillon «non représentatif», convient François Veillerette, directeur de l’ONG, qui vise à montrer qu’un comportement vertueux ne suffit pas à se protéger de toute contamination ».

« Ces 7 personnalités ont aussi (surtout ?) pour qualité d’avoir «une bonne image auprès du public, qui peut s’y identifier», et «ils vont reprendre ces résultats pour les diffuser», admet le responsable de l’ONG. Ce n’est pas de l’épidémiologie, c’est de la com… », remarque le quotidien.

Le Figaro évoque en outre « une méthode aux multiples biais », expliquant que « la méthodologie adoptée ne permet pas de tirer le moindre enseignement nouveau sur les perturbateurs endocriniens. D’abord, parce que les cheveux ont été prélevés par les volontaires eux-mêmes, puis envoyés à l’association emballés dans du papier aluminium. Quels que soient le soin pris par les participants et la qualité des consignes données, difficile de garantir qu’à aucun moment ils n’ont pu être contaminés par un autre biais ».

« Par ailleurs, l’analyse des cheveux permet de détecter des produits passés dans le sang dans les semaines précédentes mais ne donne aucune indication sur le niveau d’exposition journalière. Impossible de savoir si l’exposition mesurée dépasse ou même atteint les doses considérées comme pouvant comporter un risque », souligne le quotidien.

François Veillerette précise : « Nous ne prétendons pas avoir fait une étude scientifique publiée dans une revue à comité de lecture. Notre boulot, c’est de lancer l’alerte. Aux scientifiques et aux agences sanitaires de reproduire ces résultats sur des milliers de personnes… ».

Le Figaro relève en outre que « ce n’est pas tout à fait par hasard si Générations futures a choisi de diffuser ce jeudi son rapport : […] le 28 février, la Commission européenne doit s’accorder sur une définition de ces substances chimiques, donc sur l’encadrement des produits les contenant ».

« Or les perturbateurs endocriniens sont un vaste problème, sur lequel la science n’a pas fini de se pencher. Lesquels sont dangereux ? À quelle dose et à quels moments de la vie ? Quid des associations entre différents composés, avec de potentiels «effets cocktails»? Si l’on décide de les interdire, peut-on s’en passer ou par quoi les remplacer ? L’opinion des industriels est en la matière bien différente de celle des scientifiques et des associations. Ce n’est plus de la com. C’est de la politique… », conclut le journal.

Libération note également que « l’ONG Générations futures a fait analyser les cheveux de 7 personnalités écolos. Résultat : même les plus sensibilisés ne sont pas épargnés par ces substances chimiques présentes dans les produits du quotidien et susceptibles de modifier le système hormonal ».

Le journal relaie ces « résultats sans appel. Tous ces «cobayes» ont dans le corps chacune des familles de produits analysés. Entre 36 et 68 PE par personne ont été retrouvés dans leurs cheveux. A noter que pour des raisons de coût, toutes les familles de PE n’ont pas été recherchées. Les résultats pourraient donc être bien pires ».

Il ajoute que « ce qui inquiète le plus, c’est «l’effet cocktail» de ces PE. «Si deux substances, prises isolément, peuvent être faiblement actives, elles peuvent devenir beaucoup plus toxiques une fois mélangées», s’alarme l’ONG ».

Libération rappelle que « plusieurs centaines d’études scientifiques montrent que les PE ont des effets néfastes sur la santé. Ils sont définis par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme «une substance exogène ou un mélange qui altère la/les fonction(s) du système endocrinien et, par voie de conséquence, cause un effet délétère sur la santé d’un individu, sa descendance ou des sous-populations» ».

« Selon le produit considéré, ils agissent soit en modifiant la production naturelle de nos hormones (œstrogènes, testostérone, hormones thyroïdiennes…), soit en mimant leur action et en se substituant à elles dans les mécanismes biologiques qu’elles contrôlent (croissance, développement sexuel et cérébral, métabolisme, reproduction…), soit en empêchant leur action », explique le quotidien.

Le journal souligne ainsi que « les conséquences pour l’organisme sont multiples : altération des fonctions de reproduction et infertilité, malformation des organes reproducteurs, développement de tumeurs, troubles du métabolisme (surpoids, diabète), de la fonction thyroïdienne et du système nerveux (certains bisphénols et phtalates sont ainsi suspectés d’être incriminés dans l’hyperactivité et l’anxiété des enfants)… ».

 

Date de publication : 24 Février 2017

> Lire l’article original