Obésité : encore un paradoxe !

Commentaire. Un article sur l’obésité qui serait protectrice en cas de séjour en réanimation

 

L’ARTICLE :

Afin d’évaluer l’influence de l’indice de masse corporelle (IMC) sur le pronostic des malades de  Réanimation, des  auteurs ont analysé les données d’un grand audit. Cette enquête a en effet concerné 730 unités de soins intensifs (USI) réparties dans 84 pays.

Les dossiers de tous les patients adultes hospitalisés entre le 8 et le 18 mai2012 en Réanimation, hormis ceux admis moins de 24 heures pour une surveillance postopératoire, ont été examinés. Seuls
les dossiers avec des données anthropométriques complètes ont été retenus, soit 8 829 patients.

Les différentes catégories d’état nutritionnel reprennent les définitions classiques : la dénutrition (un IMC inférieur à 18,5 kg/m2), l’état nutritionnel  normal (IMC entre 18,5 et 24,9 kg/m2), le surpoids (IMC de 25 à 29,9 kg/m2), l’obésité (IMC de 30-39,9 kg/m2) et l’obésité morbide lorsque l’IMC est supérieur ou égal à 40 kg/m2.

L’indice de masse corporelle moyen de la cohorte dans son ensemble est de 26,4 ± 6,5 kg/m2. Environ 43 % des patients ont un IMC normal, 4 % sont dénutris, 34 % en surpoids, 15,5 % obèses et 3,5 % obèses morbides. La proportion respective de chaque catégorie d’IMC varie selon le lieu, les patients obèses étant plus représentés en Amérique du Nord, en Océanie et en Europe et les patients dénutris en Asie de l’Est et du Sud ainsi qu’au Moyen Orient.

Un plus long séjour mais une mortalité plus faible

La durée de séjour en USI est similaire pour les différentes classes d’IMC, mais les patients en surpoids et obèses ont une durée de séjour à l’hôpital prolongée (11 jours) par rapport aux patients avec un IMC normal (10 jours ; p < 0,01). En revanche, la mortalité est plus faible en USI chez les patients souffrant d’obésité morbide par rapport à ceux de statut pondéral normal (11,2 % vs 16,6 %; p = 0,015). De plus, en analyse proportionnelle des risques (régression de Cox), l’insuffisance pondérale est indépendamment associée à un risque de mortalité à 60 jours plus élevé  (hazard ratio [HR] de 1,32 ; Intervalle de Confiance à 95 % [IC 95] de 1,05 à 1,65 ; p = 0,018), alors que le surpoids est quant à lui associé à une baisse de la mortalité (HR de 0,79; à 95 %, de 0,71 à 0,89 ; p <0,001).

Les résultats paradoxaux de cette étude ne tiennent pas au fait que les patients dénutris ont un risque de mortalité plus élevé, ce qui a déjà été mis en évidence et semble logique. Ce qui interpelle, c’est bien que ce l’on considère comme pathologique selon des critères peut-être discutables (ici le surpoids mesuré par l’IMC) semble conférer un avantage de survie dès lors qu’une hospitalisation en  Réanimation est nécessaire. Il y a de quoi s’interroger sur l’IMC et ses normes.

Dr Béatrice Jourdain

Références

Sakr Y et coll. : Being Overweight Is Associated With Greater Survival in ICU Patients : Results From the Intensive Care Over Nations Audit.

Crit Care Med., 2015; 43: de 2623 à 2632

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Article paru dans la Lettre Médecine du Sens n° 93