Les infections à coronavirus, à SRAS-CoV et à MERS-CoV
Commentaire. Coronavirus, vous connaissez ? Ils ont été responsables des épidémies de SRAS. Syndromes respiratoires aigus sévères.
Le reste du temps ils donnent des rhumes banals.
Mais ce qui est intéressant, c’est qu’ils ont le même réservoir de virus que Ebola, la chauve souris. En passant par le dromadaire, tiens donc.
C’est probablement une des prochaines familles de virus qui va faire parler d’elle.
Il serait intéressant de comprendre le pourquoi de ces réservoirs de virus. En quoi cela nous parle t-il de la fonction du virus, en sachant que, dans ces cas-là, le virus n’est pas du tout dangereux pour le dromadaire et la chauve souris. Quelle est la capacité qu’ont ces animaux et que nous n’avons pas ? Et que, peut-être, le virus vient nous apporter pour nous confronter.
A suivre.
L’ARTICLE :
Dossier réalisé avec la collaboration du Pr Yazdan Yazdanpanah (unité Inserm 1137, Université Paris-Diderot, service des Maladies infectieuses et tropicales, Hôpital Bichat-Claude-Bernard, Paris) et du Pr Bruno Lina (Laboratoire de virologie et pathologies humaine, EA4610, Université Claude-Bernard-Lyon 1, Lyon) – octobre 2015
Chez l’Homme, les coronavirus entrainent des symptômes bénins de type rhume. Néanmoins, deux épidémies mortelles sont déjà survenues au 21ème siècle, impliquant des coronavirus émergents, hébergés par des animaux et soudain transmis à l’homme : le SRAS-CoV et le MERS-CoV. Les chercheurs se penchent sur les modalités de ces transmissions et se préparent à de nouveaux événements de ce type.
Les coronavirus communs chez l’homme
Les Coronavirus (CoV) forment une immense famille de virus possédant un génome à ARN extrêmement long (plusieurs milliers de nucléotides). Ils sont entourés d’une capsule de protéines en forme de couronne qui leur vaut leur nom. Il existe de nombreux sous-types de coronavirus infectant différentes espèces animales. L’Homme peut en héberger au moins cinq, parmi lesquels les plus courants sont HCoV-229 et HCoV-OC43.
Très répandus, ces virus sont associés à des rhumes et des syndromes grippaux bénins. Ils peuvent également infecter l’Homme sans déclencher de symptômes ou, à l’inverse, être impliqués dans des complications respiratoires de type pneumonie chez des personnes immunodéprimées ou des nourrissons.
Ces virus se transmettent facilement d’homme à homme par voie aérienne, au contact de sécrétions ou à celui d’objets contaminés, particulièrement en période hivernale. La période d’incubation qui précède l’apparition des symptômes dure 3 à 6 jours et les traitements, s’ils sont nécessaires, sont symptomatiques (traitement de la fièvre, des congestions ou des douleurs éventuelles). Néanmoins, les infections à coronavirus ne sont habituellement pas diagnostiquées en raison de leur caractère bénin et de leur guérison spontanée.
L’épidémie de Syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV)
Le SRAS-CoV est le premier coronavirus qui a entrainé une maladie grave chez l’Homme. Il a sévi sous forme épidémique entre novembre 2002 et juillet 2003. Plus de 8 000 cas ont été recensés dans 30 pays (dont près de 20% chez des soignants) et 774 personnes sont décédées (soit près de 10% de mortalité).
L’épidémie est partie de quelques cas dans la province du Guangdong, en Chine du Sud-Est, suite à la consommation de viande de civette infectée. Ces cas ont ensuite déclenché une chaîne de transmission interhumaine. Plusieurs cas graves sont survenus dans différentes villes des environs de Guangzhou, puis le virus a été introduit à Hong Kong en février 2003. Il s’est ensuite propagé au Vietnam, à Singapour, au Canada, aux Philippines, au Royaume-Uni ou encore aux Etats-Unis, suite aux déplacements de personnes infectées. Il a été possible d’établir un lien entre plus de la moitié des infections et un seul patient arrivé à Hong Kong le 21 février 2003 !
Comme avec les coronavirus communs, la transmission du SRAS-CoV a eu lieu de personne à personne par voie aérienne via des gouttelettes respiratoires, par contacts directs avec des sécrétions ou liquides biologiques, ou encore par l’intermédiaire d’un objet contaminé. Néanmoins, le SRAS-CoV était modérément transmissible et une fraction de patients semblait incapable de le transmettre. A l’inverse, quelques cas ont été à l’origine de très nombreux cas secondaires. Les experts ont parlé de super contaminateurs. Ce phénomène pourrait être dû à la charge virale transmise au moment de la contamination et au stade de l’infection.
L’épidémie a pu être contrôlée grâce à une alerte mondiale déclenchée le 12 mars 2003 par l’Organisation mondiale de la santé, l’arrêt de la consommation de civettes en Chine, la détection précoce des cas suspects, l’isolement des malades dès les premiers symptômes, la prise en charge des personnes avec qui ils avaient été en contact et la protection des soignants.
Et en France ?
Lors de l’épidémie de 2003, en France, tous les cas possibles de Sras devaient être signalés et les patient étaient placés en isolement strict. Les personnes contacts étaient également mises en quarantaine pendant 10 jours (à domicile) et suivies quotidiennement. Au total, 437 cas possibles de Sras ont été signalés entre mars et juillet 2003 et 77 personnes contacts ont fait l’objet d’un suivi. Sept cas probables ont été identifiés, dont un est décédé. Aucune transmission secondaire n’a été mise en évidence.
L’épidémie de Coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV)
Les premiers cas d’infection par le MERS-CoV remontent à 2012, en Arabie Saoudite. La transmission du virus se poursuit aujourd’hui à faible ampleur : à ce jour, les autorités sanitaires ont recensé 1 589 cas et 567 décès dans 26 pays (soit un taux de létalité d’environ 30%), principalement dans la péninsule arabique mais également en Corée du sud. En France, deux cas ont été diagnostiqués en 2013, dont un cas de transmission secondaire. Les patients avaient été isolés au CHRU de Lille, empêchant toute diffusion du virus.
Le virus semble transmis à l’Homme par le dromadaire via des sécrétions (urine, lait de chamelle…). Plusieurs cas de transmission inter-espèce sont à l’origine de différents foyers épidémiques humains. La transmission d’homme à homme a lieu par voie aérienne, via des gouttelettes en suspension dans l’air. Mais le virus est faiblement transmissible. Néanmoins, un patient hospitalisé en Corée du Sud est à l’origine de 154 contaminations.
L’Organisation mondiale de la santé surveille activement la diffusion du virus et recense les nouveaux cas afin de mettre à jour régulièrement la liste des pays touchés. L’enjeu est de contenir l’épidémie. Des mesures de prévention concernant les contacts avec les dromadaires, des barrières mécaniques comme le port d’un masque ou d’une blouse pour les soignants, le lavage des mains et surtout l’isolement des patients aux symptômes suspects, sont efficaces.
A l’heure actuelle, aucun traitement spécifique ou vaccin n’est disponible contre ce virus qui frappe plus sévèrement les personnes immunodéprimées ou atteintes de pathologies chroniques (diabète, insuffisance rénale, infection pulmonaire chronique…).
Des symptômes très variables pour le SRAS-CoV et le MERS-CoV
Les infections par le SRAS-CoV et le MERS-CoV sont asymptomatiques chez certaines personnes. Elles peuvent induire une simple fièvre accompagnée de toux chez d’autres. Mais, elles peuvent aussi entrainer une détresse respiratoire aigüe et le décès de la personne infectée.
Les premiers symptômes sont peu spécifiques comme une fièvre, des douleurs musculaires, des céphalées, de la fatigue. De 2 à 7 jours plus tard pour le SRAS-CoV et de 5 à 15 jours pour le MERS-CoV, apparaissent des symptômes respiratoires comme une toux sèche, des difficultés à respirer et un manque d’oxygène, ainsi qu’une dégradation de l’état général avec notamment des diarrhées fréquentes, mais également des troubles hépatiques ou urinaires, des étourdissements ou encore des problèmes neuromusculaires. La plupart des malades ont une radiographie thoracique ou une tomodensitométrie anormale dès les premiers jours de la maladie, même en l’absence de signes respiratoires. Les cas sévères évoluent en détresse respiratoire qui nécessite des soins intensifs (oxygénothérapie, ventilation assistée…).
Le diagnostic peut être posé de différentes façons : à partir d’une culture virale d’un prélèvement réalisé sur un malade, par le titrage de l’anticorps neutralisant contre ce virus, ou encore par la détection du matériel génétique du virus (par RT-PCR).
Il n’existe pas de médicament spécifique contre ces virus : la prise en charge repose sur des traitements symptomatiques et des soins de support.
Comment ces virus émergents parviennent chez l’Homme ?
Le SRAS-CoV et le MERS-CoV ont tous deux la chauve-souris comme réservoir. Le virus est asymptomatique chez cet animal. Un hôte intermédiaire est nécessaire à la transmission de ces virus à l’Homme : la civette palmiste masquée pour le SRAS-CoV, vendue sur les marchés et consommé au sud de la Chine, et le dromadaire pour le MERS-CoV.
Le virus passe chez l’Homme via les sécrétions animales, dans des conditions particulières qui restent à identifier. Des mutations génétiques facilitent probablement cette transmission inter-espèce, permettant au virus d’être reconnu par des récepteurs présents à la surface des cellules humaines. Néanmoins, il est difficile de croire qu’une à deux mutations puissent déclencher à elles seules ce passage. Pour le SRAS-CoV une poignée de contaminations serait à l’origine de la majorité des cas via une chaine de transmission humaine associée à des déplacements des personnes contaminées à travers le monde. Alors que pour le MERS, plusieurs personnes ont été contaminées depuis l’animal et ont transmis le virus en petits foyers épidémiques.
En attendant la prochaine épidémie
Le laboratoire P4 Jean Mérieux de Lyon, seul laboratoire à abriter des agents pathogènes de classe 4, les plus dangereux, dispose de souches de SRAS et de MERS et poursuit leur étude. L’objectif : être prêt avec un traitement, voire un vaccin pour contrer la prochaine épidémie.
La recherche fondamentale consiste à identifier les mécanismes pathogènes qui entrainent une forte létalité mais également les modes de transmission inter-espèce, ou encore les récepteurs présents à la surface des cellules humaines capables de reconnaître les coronavirus émergents.
Les chercheurs espèrent ainsi développer des antiviraux à très large spectre qui protègeront les individus des complications liées à l’émergence d’un ou de plusieurs nouveaux coronavirus dans le futur. Les équipes tentent également d’identifier des protéines immunisantes dans le but de développer un vaccin.
Ces travaux leurs permettent en outre de s’entraîner à étudier des souches particulièrement dangereuses dans le but de mettre au point des procédés de recherche et de développement, applicables rapidement. L’objectif : être en mesure de réagir vite en cas d’apparition d’un nouveau coronavirus pathogène.
http://www.inserm.fr/thematiques/immunologie-inflammation-infectiologie-et-microbiologie/dossiers-d-information/les-infections-a-coronavirus-a-sras-cov-et-a-mers-cov
Article paru dans la Lettre médecine du Sens n° 87