La prise de paracétamol modifie-t-elle les émotions ?

Commentaire. Le paracétamol diminuerait nos émotions. 

A la fois les émotions positives tant que négatives par diminution de l’empathie. 

Mais l’empathie c’est la capacité de souffrir avec, alors si vous diminuez la souffrance vous diminuez la capacité à souffrir avec les autres. Logique.

Le mécanisme se fait par l’intermédiaire de la sérotonine, neurotransmetteur. Cela joue sur la capacité à ressentir la douleur des autres. C’est bien cela.

Notons que l’aspirine a une action différente, elle libère la sérotonine en périphérie du cerveau, et rend les émotions plus fluides. Elle tonifie le fonctionnement cérébral.

 

L’ARTICLE :

L’c le plus vendu de France réduirait le sentiment d’empathie, conclut une étude qui n’est pas la première à se pencher sur les effets du paracétamol sur nos sentiments.

Doliprane, Efferalgan, Dafalgan… Sous différentes marques, le paracétamol est le médicament le plus vendu de France, avec plus de 500 millions de boîtes en 2014. Un usage généralisé qui concerne également d’autres pays, comme les États-Unis (23% des adultes prennent du paracétamol chaque semaine), et qui incitent les chercheurs à identifier des effets secondaires insoupçonnés, bien au-delà de son effet antidouleur. Deux études publiés en 2013 et en 2015 ont ainsi mis en évidence que les individus ayant avalé des doses normales de paracétamol ressentaient moins de sentiments négatifs face aux photos les plus tristes, et moins de sentiments positifs devant celles les plus gaies. Comme si la molécule atténuait les sentiments en effaçant joies et peines extrêmes… Une hypothèse surprenante complétée par une nouvelle étude, publiée dans le journal Social Cognitive and Affective Neuroscience, qui associe la prise de paracétamol à une diminution de l’empathie.

Des douleurs plus supportables pour les autres

Dans cette étude parue récemment, des chercheurs de l’Université de l’Ohio (États-Unis) – ces mêmes auteurs qui étaient à l’origine de l’étude publié en 2015 -, ont demandé à 40 étudiants d’ingérer 1.000 mg de paracétamol. Une heure après, les volontaires ont lu huit petites histoires dans lesquelles l’un des personnages souffraient physiquement (une coupure profonde au couteau par exemple) ou moralement (comme le décès d’un proche). Ils devaient attribuer une note de 1 à 5 pour juger les réactions émotionnelles de chaque protagoniste. Même exercice pour 40 autres étudiants, qui avaient pris à la place du médicament un placebo. Verdict : les étudiants ayant ingéré du paracétamol étaient moins enclins à voir et reconnaître la douleur des personnages par rapport au groupe contrôle. Pour confirmer leur résultat, les auteurs ont mené une seconde expérience, plutôt originale, incluant 114 étudiants dont la moitié devait avaler du paracétamol, et l’autre un placebo. Puis les volontaires ont reçu dans les oreilles un bruit de quelques secondes allant de 75 décibels (l’équivalent du bruit d’une automobile) à 105 décibels (une discothèque). Ils ont ensuite noté de 1 à 10 la gêne occasionnée. Les chercheurs leur ont ensuite demandé d’imaginer ce que pourrait ressentir un inconnu. Là encore, ceux ayant avalé du paracétamol ont jugé que ces bruits seraient moins gênants pour les autres que pour eux-mêmes…

La sérotonine en cause ?

« Le paracétamol est un antidouleur, mais il pourrait aussi diminuer l’empathie que l’on ressent pour les autres alors mêmes qu’ils vivent les mêmes situations douloureuses », résume dans un communiqué Dominik Mischkowski, co-auteur de l’étude. « Cet effet semble inquiétant, a ajouté Baldwin Way, principal auteur. Cela voudrait dire que l’on se montrerait moins compréhensif face aux sentiments de son conjoint en cas de dispute après une prise de paracétamol, par exemple. » Néanmoins, la conclusion de leurs travaux ne les surprend pas totalement : « en 2004, des électroencéphalogrammes avaient montré qu’en situation de douleur, les zones du cerveau qui s’activent sont les mêmes que celles qui sont sollicitées lorsque l’on imagine la douleur ressentie par quelqu’un d’autre », expliquent les chercheurs.

Reste à comprendre comment la molécule pourrait influencer notre réactivité émotionnelle. « Nous ne connaissons pas le mécanisme en jeu, explique   Baldwin Way. Avec ses collègues, ce dernier lance une piste d’explication en direction de la sérotonine, ce neurotransmetteur impliqué dans la transmission et le contrôle de la douleur et dont on sait qu’il joue aussi sur l’humeur. En outre, l’étude relatée ici comporte tout de même quelques limites scientifiques puisqu’elle se base sur les déclarations d’un nombre (faible) de participants. Reste à confirmer (ou infirmer) ces premiers résultats. Quant aux chercheurs, ils poursuivent leurs recherches sur la compréhension du mécanisme en jeu et veulent vérifier si d’autres molécules peuvent avoir le même effet sur l’empathie. Prochaine cible : l’ibuprofène.

http://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/20160512.OBS0363/la-prise-de-paracetamol-modifie-t-elle-les-emotions.html

 

Article paru dans la Lettre Médecine du Sens n° 120