Discours anti vaccination : le piège d’internet

Commentaire.

Nous sommes ici au coeur du problème, cet article intéressant montre que plus de transparence donnerait plus de crédibilité au discours des pro-vaccination. Il est clairement dit que reconnaitre les limites et les effets secondaires aiderait à limiter la défiance face au discours officiel.

Si nous lisons entre les lignes cela signifie que dans le discours officiel on ne parle ni des limites, ni des effets secondaires. Embêtant.

L’ARTICLE :

Grave anti-vaccination de 1800 « La vaccine morte en avortant de son dernier monstre »

Washington, le mercredi 11 février 2015 – Depuis 2013, les Etats-Unis sont confrontés à une recrudescence de la rougeole. Après avoir enregistré pendant longtemps moins d’une soixantaine de cas chaque année, les Centres de contrôle des maladies (CDC) ont recensé 173 notifications en 2013et 644 en 2014, tandis que le premier mois de l’année 2015 a déjà vu 102 infections répertoriées. Le recul de la couverture vaccinale outre Atlantique fait le lit de cette situation. En 2013, comme le relève le site Medscape, le pourcentage d’enfants dûment vaccinés contre la rougeole aux Etats-Unis (91 %) est inférieur à la couverture obtenue dans seize pays d’Afrique !

Le rejet de la vaccination connaît des explications diverses. Elles sont fréquemment religieuses : l’absence de vaccination se retrouve fréquemment dans la communauté Amish et il est possible d’invoquer de telles considérations pour demander une « dérogation » à l’obligation vaccinale auprès des CDC. Parallèlement à ces considérations, l’adhésion aux discours « classiques » anti vaccination est de plus en plus forte, notamment dans les milieux favorisés. Manipulation de l’industrie pharmaceutique et des autorités sanitaires masquant certaines données évocatrices de divers risques et remise en cause de l’efficacité et de l’utilité de la vaccination sont ainsi fréquemment invoquées pour refuser l’immunisation de ses enfants contre la rougeole. Pourtant, les chiffres des CDC sont sans appel : une enquête menée auprès de 288 personnes contaminées par la rougeole en 2014 a révélé que 69 % des patients n’avaient pas été vaccinés.

La parole d’un internaute jugée aussi crédible que le clip d’un organe officiel

Face à cette situation, beaucoup s’interrogent sur la défiance qui s’est installée au sein de l’opinion publique vis-à-vis des discours officiels soulignant les mérites de la vaccination. Le rôle joué par internet est notamment régulièrement rappelé. A cet égard, une étude publiée dans le journal of Advertising conduite par trois spécialistes en psychosociologie et comportement du consommateur de l’université de Washington confirme le discrédit des messages institutionnels au profit d’internet.

Ioannis Kareklas et ses collaborateurs ont fait visionner à 129 personnes deux spots vidéos s’intéressant à la vaccination. Le premier, favorable à cette pratique, était censé émaner des CDC, le second, hostile, devait être compris comme diffusé par le National Vaccine Information Council (NVIC). Parallèlement au visionnage de ces clips, les participants découvraient les commentaires censés avoir été publiés à la suite de leur mise en ligne sur les sites respectifs des deux organismes. Les réactions simulées des internautes n’étaient assorties d’aucune mention permettant d’identifier leur profession, leur âge ou leur sexe. Des questions ont ensuite été posées aux participants quant à la confiance accordée aux différentes informations qu’ils avaient ainsi recueillies. Il est apparu clairement que les sujets accordaient un même niveau de crédibilité aux clips officiels qu’ils avaient visionnés et aux commentaires qu’ils avaient lus, bien qu’ils ignoraient tout de leurs émetteurs. Dans un second temps, les protagonistes de l’étude « dévoilèrent » aux participants l’identité des commentateurs : un étudiant en littérature britannique, un lobbyiste intervenant dans les questions de santé et un médecin spécialisé en pathologie infectieuse. Interrogés de nouveau sur la crédibilité qu’ils accordaient aux différents messages qu’ils avaient lus, les participants manifestèrent clairement que leur confiance allait d’abord au médecin internaute, avant les discours officiels véhiculés par les clips, quelle que soit leur teneur.

Le piège de la censure

Ces résultats confirment des tendances déjà perçues : sur internet, l’expertise individuelle est davantage reconnue que les messages institutionnels, systématiquement suspectés de servir des intérêts occultes. Un tel mécanisme explique, selon les auteurs de cette étude, la vigueur des discours anti vaccination sur le web. Dès lors, quelle méthode mettre en œuvre pour contrer cette force de persuasion qui peut partout s’exercer. Certains ont voulu croire que la suppression de la possibilité de commenter certains articles était la solution. Plusieurs médias américains dont le Chicago Sun Times, le Huffington Post et même Science ont ainsi choisi cette option. Elle semble cependant contre productive selon Ioannis Kareklas, qui estime qu’elle ne peut que renforcer le sentiment de défiance des lecteurs et l’idée d’une instrumentalisation. Le chercheur en psychosociologie préconise d’autres tactiques : présenter les arguments favorables à la vaccination de façon à ce qu’ils puissent échapper à l’accusation de manipulation, c’est-à-dire en n’omettant pas d’évoquer les éventuels effets négatifs ou les limites de l’efficacité. Concernant les commentaires des internautes, Ioannis Kareklas suggère que les rédactions mettent en avant les réactions émanant de personnalités expertes, servant un discours positif.

Aurélie Haroche

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